79. Copperfield remarque que la berline
Copperfield remarque que la berline de Rivage n’est pas dans son allée.
Une aura étrange se dégage de sa maison.
Il sonne à la porte d’entrée.
C’est la troisième fois qu’il va chez lui.
La première fois, Rivage l’avait invité avec Sam Delta pour manger un barbecue. Il avait prévu des travers de porc épicés ; en cuisson lente pour permettre à la fumée de bien imprégner la viande. Toutes les demi-heures pendant sept heures, il avait arrosé les travers de jus de pomme au poivre et de vinaigre de cidre. Copperfield n’avait jamais mangé une viande de cette qualité. Sam Delta avait dit : quelle recette de fou furieux.
La deuxième fois, Rivage l’avait aussi invité avec Sam Delta, mais pas pour la même raison. Il voulait leur raconter une histoire qui lui était arrivée à Copenhague, parce qu’il n’arrivait pas à la comprendre. Copperfield ne se souvient plus de l’histoire qu’il a racontée. Mais il se souvient que Sam Delta avait fini par monopoliser la parole pour parler de ses propres problèmes.
Chaque fois que Rivage invitait Copperfield, Sam Delta était là aussi. Copperfield a toujours trouvé que c’était un ami bizarre qui restait avec Rivage pour de mauvaises raisons.
Il a toujours pensé que ce n’était pas quelqu’un de fiable.
Personne n’ouvre la porte d’entrée.
Copperfield fait demi-tour et s’arrête devant sa voiture. Il regarde les autres maisons dans la rue. Par les fenêtres, il voit les ombres des familles qui parlent et qui mangent. Les lampadaires éclairent la chaussée et le trottoir à intervalles réguliers. Il voit encore un peu les arbres et le ciel.
La maison de Rivage, son jardin, les voitures garées et les autres maisons dans la rue, tout est déprimant. Copperfield ouvre son carnet et note : ici la vie s’est évaporée. Il dessine un fantôme avec le visage triste et entoure sa phrase dans une bulle de dialogue. Il colorie toute la page en noir.
Il reste là, assis sur le capot de la voiture.
Il pense : tant que Pluton est avec lui, tout ira bien.
Il démarre et roule vers L’Alambra. À la radio, il entend la fin de Superstar, la nouvelle chanson de Coltrane 3000. Coltrane 3000 y chante qu’il a toujours tout voulu posséder.
Après la chanson, Copperfield entend une interview en direct de Coltrane 3000. Il raconte l’origine de cette chanson. Sur Internet, il a lu que d’ici à 2040 la Terre ne serait plus habitable. Les humains les plus riches embarqueront dans des navettes qui les emmèneront sur Mars. Là-bas, ils pourront refonder une nouvelle société dans des bases de luxe en train d’être construites. Coltrane 3000 dit : je voulais créer une chanson qui serait numéro un dans le monde entier. Je voulais gagner assez d’argent pour acheter mon ticket pour Mars.
Copperfield éteint la radio. Il pense que le monde prend une mauvaise direction.
Au même moment, Peter Fire arrive à la carrière.
Grâce au programme d’abonnement Amazon Prime, il a reçu sa commande en moins de 24 heures. C’est une combinaison noire intégrale en élasthanne, parfaite pour se camoufler et bouger sans faire de bruit.
Il l’enfile au skatepark et cache ses vêtements dans un terrier vide. Dylan lui a donné son numéro pour qu’il l’appelle quand il aura trouvé le trésor.
Il prend le même chemin que la veille et arrive sous la falaise. Il trouve une bonne cachette derrière un monticule de rochers. Il regarde sa montre. Dans quatre ou cinq heures, les hommes reviendront.
Il est encore plus impatient que le jour où il a reçu sa Game Boy Advance.
Ce trésor va changer sa vie.