Mista marche sur le seul trottoir praticable dans la zone industrielle au nord de Myriad Pro. Les lampadaires font des lumières et des ombres intrigantes sur le sol. Toutes les usines sont fermées, et les entrepôts aussi. Les quelques arbres plantés à 10 mètres les uns des autres dans le bitume bougent un peu à cause du vent.

Mista contourne le hangar d’un magasin de meubles. Il suit les immenses flèches blanches peintes sur le bitume et destinées aux voitures. À l’arrière du hangar, il ouvre une porte en métal cachée entre un local électrique et un extincteur.

L’intérieur du hangar est dans le noir, sauf un petit bureau éclairé. Dedans, un homme est assis. Cet homme s’appelle Diavolo. Il est en train de signer et de parapher toutes les pages d’un contrat épais.

Mista s’assoit face à lui. Il le regarde répéter les mêmes gestes jusqu’à la fin.

Diavolo capuchonne son stylo et le range dans une poche de sa veste ; puis il agrafe ensemble les différentes pages du contrat et les fait glisser sur le bord du bureau. Il regarde Mista et dit : je t’écoute.

Pour mieux comprendre ce dont Mista et Diavolo parlent, il faut revenir un jour en arrière, à Portobello.

Là-bas, Diavolo donne pour mission à Mista de convoyer la BMW M4 noire jusqu’à Miami, où se trouve sa résidence principale. Ce n’est pas la BMW qui est importante, mais ce qu’elle contient.

Dans son coffre se trouve un corps humain spécial.

À part Diavolo, personne ne sait rien sur ce corps.

Pour rejoindre Miami, le GPS de la BM conseille à Mista un itinéraire qui le fait passer par Myriad Pro. C’est la ville la plus proche pour accéder à l’autoroute à partir de Portobello. En s’insérant sur l’autoroute, Mista voit que la police de Myriad Pro le poursuit, et il se demande si quelqu’un leur a parlé de sa mission.

Un peu plus tard, il a l’accident lors duquel sa BM fait des tonneaux et finit sur le toit. Quand il revient sur les lieux de l’accident après sa discussion à l’Ultracheese avec Copperfield, la BM a disparu. Il dit à Copperfield : la société de production est sans doute venue la récupérer, je vais rentrer à pied.

En vrai, Mista n’a aucune idée de qui a récupéré la BM.

Il entend le bruit d’un train qui passe derrière le hangar en contrebas.

On m’a tendu un piège, dit-il à Diavolo.

Diavolo ne veut pas s’attarder à Myriad Pro. C’est une ville qu’il déteste et dans laquelle il n’a que des mauvais souvenirs. Il dit : tu sais Mista, si je t’ai choisi, c’est parce que je te fais confiance. Aussitôt après il se couche sur la table et attrape le menton de Mista avec sa main droite. Il dit : tu vas devoir réparer ton erreur, sinon je vais être très déçu.

Mista regarde les yeux de Diavolo à 10 cm de lui. Il a l’impression que ses pupilles tremblent et se déforment comme des flammes.

Diavolo lâche le menton de Mista. Il récupère une sorte de carte de visite dans le seul casier qui décore le bureau. Il la lui tend et dit : rejoins-moi à cette adresse dans deux jours.

Mista repart à pied en sens inverse et s’arrête dans un Burger King qu’il a repéré à l’aller. Il commande un Big King XXL avec des moyennes frites et un Fanta, puis il va attendre qu’on lui serve son plateau en salle.

Une femme de ménage est en train de laver le sol avant la fermeture. Chaque fois qu’elle change de zone, elle déplace un panneau jaune qui prévient que le sol est glissant.

C’est la première fois que Mista échoue dans une de ses missions. Il pense à l’étrange mouvement des pupilles de Diavolo et à la terreur qu’il lui inspire. D’habitude, Diavolo n’intervient jamais en personne pour contrôler ses affaires ; plusieurs lieutenants s’en chargent à sa place. Mista comprend que le convoi du corps est d’une importance bien plus grande que les missions précédentes. Il essaie de deviner l’identité de ce corps, mais une nouvelle image de Diavolo envahit son esprit et il arrête d’y penser.

Un homme qui va aux toilettes marche exprès sur le sol propre et laisse plusieurs empreintes de pas. Mista est obsédé par la boue qui salit le carrelage lessivé. Il rejoint l’homme aux toilettes et lui fracasse le visage deux fois contre un miroir, puis sept fois contre une pissotière.

Quand il revient, son menu l’attend sur sa table.

Il s’essuie les mains avec la serviette en papier et ouvre l’emballage du Big King.