Rivage et Copperfield retournent au collège. Rivage veut interroger le proviseur. Dans la voiture, il dit : quand même Copperfield, quel plaisir de mener cette enquête.

Rivage adore les enquêtes. C’est la première fois qu’il cherche le meurtrier d’un adolescent, et il y trouve cette part d’inconnu qui fait le sel de la vie.

Il dit : au fond, je crois que j’aime les crimes, même s’ils sont horribles. Copperfield acquiesce et dit : oui, il y a du beau même dans le crime. Rivage demande : tu trouves que les cadavres c’est beau ? Non, dit Copperfield, je voulais dire que même les éléments qui composent un crime, comme le sang, la douleur et la peine, peuvent fabriquer du beau.

Copperfield a du mal à s’exprimer clairement.

Rivage ne comprend pas où il veut en venir.

Il dit : tu sais Copperfield, tuer des enfants, c’est vraiment atroce.

15 minutes plus tard, il interroge le proviseur du collège et lui répète la même fin de phrase. Le proviseur dit : oui, c’est atroce ce monde dans lequel on vit. Sur la droite de son bureau, il regarde une photo de son fils, en train de jouer du saxophone.

C’est votre fils ? demande Rivage. Il a l’air de s’y connaître en saxo.

Le proviseur est ému. Il dit : oui, d’ici quelques années il deviendra un grand saxophoniste, c’est certain. Il demande : vous pensez que d’autres adolescents sont impliqués dans cette histoire ?

Rivage ne sait pas si par histoire le proviseur parle du meurtre de Ken ou d’autre chose. Dans le doute, il répond aux deux questions par une seule phrase passe-partout qui sous-entend que toutes les pistes sont encore envisageables.

Le proviseur prend un air triste. Il dit : en tout cas, ici, on n’aurait jamais pu se douter que Ken était la cible d’un tueur. Je crois que tout le monde est très choqué par sa mort.

Rivage regarde par la fenêtre. Il voit des dizaines de collégiens sans histoire aller et venir dans la cour du collège. Deux d’entre eux discutent d’un nouveau bloc intégré dans le dernier patch Minecraft. Il permet d’accéder directement au Nether. Le premier dit : c’est vraiment pratique. L’autre dit : moi j’ai trop peur d’aller là-bas.

D’autres groupes dans la cour sont assis sur des bancs et parlent. Plus loin, un collégien se fait pousser par cinq autres jusque dans le casier à cartables. Des manuels de mathématiques, de sciences et d’histoire-géo sont abandonnés sur le sol dans la poussière. Un surveillant va et vient dans les toilettes des filles et ouvre des portes au hasard.

Le proviseur se lève et dit : les jeunes, quand même.

Rivage serre la main du proviseur et quitte son bureau. Copperfield note : le proviseur parle comme quelqu’un qui ment. Dehors, à 20 mètres de là, quatre collégiens forment un cercle et discutent. Rivage garde les mains dans ses poches pendant que Copperfield continue d’écrire.

L’un d’entre eux les remarque en train d’attendre et va les voir. Il dit à Rivage : alors c’est vous l’inspecteur qui cherche le tueur de Ken. Rivage dit oui et lui présente son assistant, Copperfield. Moi c’est Pete, dit l’adolescent. J’espère que vous l’arrêterez vite avant qu’il en tue d’autres.

Pete regarde le sol.

Il demande : Ken, dans quel état vous l’avez retrouvé ? Rivage ne peut pas lui donner ce genre d’informations. Pete dit : ici, tout le monde raconte qu’il savait qu’il allait mourir.

Rivage ne se souvient pas que d’autres proches de Ken lui aient déjà dit ça. Il se tourne vers Copperfield, qui lui rend un regard étonné. Il pense aux femmes dans la brasserie, qui en savaient aussi plus qu’eux. Il demande : il avait reçu des menaces ?

Je sais pas, dit Pete, c’est juste des rumeurs.

Il dit : c’est juste ce que tout le monde raconte.

Pete relève la tête et surprend le proviseur en train de les regarder depuis la fenêtre de son bureau. Copperfield voit que Pete regarde quelqu’un par-dessus son épaule, et il se retourne. Le proviseur a disparu.