Trish se réveille. Elle est seule dans la chambre.

Les voix dehors font comme s’il y avait un marché sur la place.

Elle s’allonge sur le dos, regarde le plafond et pense à la discussion qu’elle a eue la veille avec Upamecano. Elle espère que tout ira bien pour Casca, même si elle a du mal à imaginer les missions d’un job comme gardienne de la couronne.

Elle pense au destin et à la façon dont les gens changent quand ils ont de grandes responsabilités.

Elle s’assoit sur le bord du lit et se masse le visage avec les mains. Elle trouve un mot sur sa table de chevet avec écrit : Rejoins-nous quand tu es levée. On est en bas. Casca.

Elle se douche et prend l’ascenseur pour arriver dans la salle de réception de l’auberge.

La déco lui fait penser aux vieilles auberges du Moyen Âge, avec des bancs hyper longs et des tables en bois, des briques et des poutres apparentes, un faux feu de cheminée, de vieux livres et une playlist de bruitages ambiance taverne.

Il y a aussi deux écrans LCD aux murs pour regarder les infos.

Tous les gens dans la salle sont en train de manger et de parler.

Casca et Upamecano sont assis au fond, chacun devant une assiette avec des œufs, du pain brioché, de la confiture, une salade de fruits dans un petit ramequin et un verre de jus d’orange.

Trish voit un tableau sur lequel elle lit BUFFET À VOLONTÉ.

D’autres gens font la queue et remplissent leurs plateaux d’aliments. Trish prend un plateau et se met dans la file. Elle pense à la formule buffet à volonté, qui a l’air vraiment intéressante. Elle se sert des œufs brouillés et sent que le type à sa gauche essaie de communiquer avec elle. Il dit : vous voulez un conseil ?

Trish lui demande pardon.

Il dit : ne prenez pas le buffet à volonté.

Il y a un problème ? demande Trish.

Parlez moins fort, dit le type. Il approche son visage du sien et dit : les formules à volonté, c’est toujours une arnaque.

Il lui explique que les restaurateurs savent que 95 % des clients n’ont de l’appétit que pour une assiette normale. Le buffet à volonté leur donne l’illusion d’un appétit plus grand qu’en réalité. Ils paient donc le buffet à volonté plus cher qu’un plat unique, mais mangent en fait une quantité de nourriture identique.

Quand ils pourraient profiter de la plus-value du buffet, les clients n’ont plus faim.

Les 5 % des clients qui ont encore faim après leur première assiette de buffet à volonté se servent environ une demi-assiette supplémentaire. Ce n’est pas une assiette plaisir mais plutôt une assiette pour faire honneur au buffet.

Donc c’est très rentable pour les restaurateurs comme l’auberge qui arnaquent les clients en se basant sur la trop grande confiance qu’ils ont en leur appétit.

Tout le monde le sait, dit le type.

Trish finit de remplir son plateau avec des regrets. Elle prend quand même la formule buffet à volonté parce qu’elle a n’a pas eu le temps de mémoriser les autres à la carte.

Le type lui dit : la prochaine fois, vous saurez.

Sur son plateau, il n’a que deux tartines et une plaquette de beurre.

Trish rejoint Casca et Upamecano à leur table. Casca lui donne sa salade de fruits parce qu’elle n’a plus faim. Elle dit : j’ai eu les yeux plus gros que le ventre.

Trish serre le poing.

Pendant que Trish dormait, Upamecano a raconté à Casca à peu près les mêmes choses que celles qu’il lui a racontées la nuit passée. Casca a réagi normalement quand elle a appris qu’elle avait été choisie par la couronne pour devenir la prochaine gardienne. Elle a dit : j’avais peur de son pouvoir, mais maintenant je comprends ce qu’elle voulait me dire.

Il est temps pour Upamecano d’expliquer à Casca et Trish où elles vont.

Il leur dit : c’est une information confidentielle.

Il sort un Motorola RAZR de sous son gantelet et lance un audio qui date de la semaine d’avant. C’est un échange de messages vocaux entre lui et une femme. Il dit : la femme que vous allez entendre s’appelle Mircea Speedwagon. C’est la PDG de la fondation Speedwagon.

La fondation Speedwagon est une société de recherche internationale spécialisée dans les technologies de pointe. Elle est réputée pour être plus puissante que certains pays et fonctionne avec des fonds privés.

Upamecano lance l’audio.

Speedwagon dit : bonjour Upamecano. Notre équipe a localisé le portail d’accès au sanctuaire. Il est sous la banquise arctique, au parallèle 66° 33’ 48,430” de latitude nord.

Upamecano dit : quel est son état ?

Speedwagon dit : bon. Les repérages étaient difficiles, mais nous avons réussi à dégager un accès praticable. Nous prévoyons d’aménager une station avec des espaces de travail autour pour faire quelques études. J’ai fait appel à une équipe de professionnelles qui a l’habitude de ce genre de mission. Elles n’ont de contact avec personne depuis qu’elles sont arrivées.

Upamecano dit : je vais bientôt ramener la couronne. Je ne suis plus très loin.

Speedwagon dit : je vous fais confiance. Soyez prudent.

Upamecano arrête la lecture et range son téléphone sous son gantelet.

Il dit : Mircea Speedwagon m’aide depuis que j’ai perdu la couronne. C’est sa fondation qui a récupéré mon armure et pris soin d’elle le temps que mon aura revienne. Elle veut que les choses rentrent dans l’ordre et que la couronne retrouve sa place. Nous devons la rejoindre au plus vite. Une des membres de sa fondation nous attend à Copenhague.

Trish était tellement concentrée à manger ce qu’il y avait sur son plateau qu’elle n’a pas vraiment écouté la conversation. Elle a quand même retenu les mots Arctique, sanctuaire, Speedwagon et Copenhague, qui sont les plus importants.

Elle dit : on doit prendre le bateau, c’est ça ?