35. Les sœurs Braska arrivent
Les sœurs Braska arrivent dans le hall de l’immeuble. Elles voient leurs hommes de main étendus sur le sol dans de grosses flaques de sang. Jessie Braska dit : mais c’est quoi ce bordel.
Au 76e étage, elles voient la même scène, mais dans un décor un peu différent. Par exemple, la moquette a remplacé le marbre, et puis la vue est beaucoup plus sympa. Le panorama va jusqu’à la digue de Myriad Pro à l’ouest, jusqu’à la carrière à l’est, et jusqu’à des champs au nord.
Yuna Braska pose son panini sur la fontaine à eau à l’entrée de l’étage. Chaque chose en son temps, pense-t-elle. D’abord je règle cette histoire, et ensuite je mange mon panini.
Ce que Diavolo a oublié de dire à Mista, c’est qu’il y a non pas deux, mais trois sœurs Braska. La plus jeune, Nami Braska, vient tout juste de rejoindre la codirection de leur organisation. Elle découvre encore le métier, mais s’y fait vite.
Elle dit : je vais buter le fils de chien qui nous a fait ça.
C’est à ce moment-là que les regards des sœurs Braska et de Mista se croisent. Mista est assis sur une chaise de bureau en similicuir avec son fusil-mitrailleur dans les mains. Il dit : je vous attendais.
La lumière qui arrive de l’extérieur par les grandes baies vitrées accentue le vert de la moquette et le rouge du sang des cadavres.
Mista dit : j’ai quelques questions à vous poser.
La tension est très forte car même les hommes de main qui ne sont pas morts font semblant de l’être pour éviter d’être pris à partie. La force physique et mentale de Mista et des sœurs Braska les surpasse de façon vertigineuse. Ils sont tous les quatre dotés d’une aura surpuissante.
Nami Braska tire sur Mista en rafale avec deux Uzi.
Mista évite les balles et saute derrière un bureau en faux bois qui se fait pulvériser par les impacts. Les deux autres sœurs ne font rien de spécial. Yuna Braska pense à son panini qui refroidit. Jessie Braska pense à la somme colossale qu’elles vont devoir dépenser pour remplacer tous les hommes de main et la déco.
Elle évalue la somme à au moins 1 699 999 $.
Cette confrontation imprévue est une sorte de baptême du feu pour Nami Braska ; sa première vraie mission. Elle n’a pas envie de décevoir ses sœurs ni de se ridiculiser. Les chargeurs des deux Uzi se vident à une vitesse incroyable.
De derrière le bureau, Mista demande : pourquoi vous avez volé le corps ?
Jessie Braska demande : de quoi tu parles ?
Nami Braska tire toujours sur Mista pendant qu’il parle avec Jessie Braska. Il doit se décaler légèrement vers la droite ou vers la gauche du bureau pour ne pas se faire toucher ; c’est un peu énervant.
Il demande : pourquoi vous avez saboté ma voiture sur l’autoroute ?
Jessie et Yuna Braska se regardent ; elles ne voient pas de quoi il parle. En plus, elles l’entendent très mal à cause du bruit que font les Uzi. Nami, arrête de tirer, dit Jessie Braska, on ne comprend pas ce qu’il raconte. Mista sort sa tête de derrière le bureau. Merci, dit-il, j’allais la tuer.
Personne me tue, dit Nami Braska.
Tout le monde s’assoit autour d’une table ronde encore intacte et Mista expose son problème en détail. Ce n’est pas nous, dit Jessie Braska. On n’agit que si quelqu’un nous en donne l’ordre, et personne ne nous a ordonné de voler ta voiture ni le corps qui était dedans.
Yuna Braska dit : la preuve, c’est que tu es toujours en vie.
Même si Mista et les sœurs Braska parlent tous les quatre sur un ton décontracté, ils dégagent une aura négative énorme. Un seul geste ou une seule parole déplacés, et c’est la mort. Ils sont dans une autre dimension.
Les portes de l’ascenseur s’ouvrent et un employé de bureau dit : oups désolé, je me suis trompé d’étage. Il est percuté par la force cumulée des quatre auras comme par une gigantesque sulfateuse. Quand les portes de l’ascenseur se referment, il s’évanouit.
Vous avez un crayon ? demande Mista. Jessie Braska lui prête celui qu’elle garde dans sa veste. Mista sort le bout de papier que lui a donné Diavolo et raye le nom des sœurs Braska.
Et pour ça ? demande Jessie Braska en montrant les dégâts autour d’eux. Pas de souci, dit Mista, envoyez-moi la facture et je la transmettrai à mon boss. C’est un homme de confiance, vous serez dédommagées avec des intérêts.
L’histoire est réglée. Yuna Braska croque dans son panini tiède.
Mista récupère son sac et prend les escaliers pour quitter l’immeuble. Pendant qu’il descend, il réfléchit au chemin le plus court pour aller d’ici jusqu’à l’Ultracheese. Une fois en bas, il a le trajet parfait en tête.